vendredi,2 juin 2023
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Maître BANTSANTSA : « La Cour constitutionnelle était là pour organiser la proclamation de la victoire de monsieur Ali Bongo »

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Un quart d’heure avant le terme du délai légalement prévu pour former un recours en contestation des résultats de l’élection présidentielle, Jean Ping par le biais de ses conseils Maîtres Jean Rémy BANTSANTSA et Éric IGA-IGA a saisi la Cour constitutionnelle. Nous revenons donc sur certains éléments de la phase contentieuse avec Me Jean Rémy BANTSANTSA.

En saisissant la Cour constitutionnelle, Jean PING attaquait la décision de la Commission électorale nationale et permanente  (Cenap) qui donnait Bongo Ondimba Ali vainqueur dans le Haut-Ogooué.
De ce fait, le contentieux en contestation des résultats des élections dans le Haut-Ogooué ne devrait-il pas opposer Jean Ping à la Cenap qui est l’autorité qui a rendu la décision au lieu d’Ali Bongo ?

« Le contentieux que nous avons porté devant la Cour constitutionnelle est un contentieux portant sur les résultats de l’élection, il s’agit d’un contentieux après la proclamation par le Ministre de l’Intérieur des résultats de l’élection présidentielle.
À ce stade, lorsque le Ministre de l’Intérieur a annoncé les résultats qui lui ont été transmis par la Cenap, le seul recours qui reste est celui qui doit être porté devant la Cour constitutionnelle et nous sommes allés devant cette dernière pour demander une chose simple: la réformation des résultats annoncés par le Ministre dans la province du Haut-Ogooué. On demandait précisément que l’on recompte les suffrages bureau de vote par bureau de vote pour voir si les résultats annoncés par le Ministre étaient réels et exactes. Nous ne sommes pas allés en annulation d’une quelconque élection ni en annulation des documents de la Cenap. Nous sommes allés demander qu’on réforme ces résultats parce que selon nous, les calculs n’avaient pas été faits correctement donc il s’agissait tout simplement du  recomptage des voix dans les bureaux de vote du Haut Ogooué pour arriver au résultat provincial tel que sorti des urnes, voilà le sens du recours que nous avons introduit devant la Cour constitutionnelle.
Je rappelle que c’est un recours qui ne pouvait être fait que devant la Cour constitutionnelle parce qu’il intervient après l’annonce des résultats par le Ministre de l’Intérieur. »

Quel est votre avis sur le fait que la Cour constitutionnelle ait fait droit au recours reconventionnel plutôt qu’au recours de Jean Ping?

« Une chose est très claire à comprendre aujourd’hui : la Cour constitutionnelle n’était pas là pour examiner le recours que nous avons introduit, la Cour constitutionnelle était là pour organiser la proclamation de la victoire de monsieur Ali Bongo parce sa démarche montre que dès l’entame de la procédure qu’il n’était pas question pour la Cour constitutionnelle d’organiser une quelconque instruction contradictoire, une instruction qui nous aurait permis de confronter les procès verbaux dans le Haut-Ogooué puisque pour nous il s’agissait uniquement de vérifier les résultats dans cette province. Mais après on a appris par la suite que la Cour constitutionnelle  avait décidé regarder l’ensemble des 2579 procès-verbaux de toute la circonscription électorale. Mais même à ce stade, puisque nous avions nos procès-verbaux que nous avons obtenu à la sortie des bureaux de vote, nous avons demandé avec insistance au juge rapporteur  de les confronter avec ceux détenu par le camp adverse et la CENAP, nous avons eu comme réponse une fin de non revoir. En fin de compte, le monde entier l’a bien compris, l’objectif de la Cour constitutionnelle était de proclamer Ali Bongo vainqueur.  C’est la raison pour laquelle nous avons assisté à ces annulations aussi bizarres que ridicules des bureaux de vote du 2ème arrondissement de Libreville sur la base de faux procès verbaux qui ont été fabriqués par le PDG et le camp d’Ali Bongo lui même. Ce sont ces faux procès-verbaux qu’ils ont mis dans le dossier de la Cour constitutionnelle en prétendant qu’il y avait des irrégularités dans le 2ème arrondissement.  Mais tout cela est faux puisque nos procès-verbaux de tout le 2ème arrondissement de Libreville ne comportent aucune rature ou surcharge et nous les avons communiqués à la Cour constitutionnelle qui n’en a pas tenu compte. Donc l’objectif de la Cour constitutionnelle, je le répète, n’était pas de dire le droit en toute impartialité et objectivité mais plutôt de proclamer Ali Bongo vainqueur alors que les résultats réels sortis des urnes donnaient Jean Ping vainqueur avec plus de 51% des suffrages contre un peu plus de 46% à Ali Bongo. »

Vous avez évoqué au cours de votre plaidoirie l’opacité de la procédure, que doit comprendre le profane du droit?

« L’opacité parce qu’il n’y avait rien de visible et de clair. En droit, la procédure d’instruction est contradictoire cela signifie que tout doit être échangé entre les parties au procès. Vous avez une pièce à produire au dossier, vous la produisez mais vous me la communiquer aussi ; pareillement pour moi si j’ai une pièce  je vous la communique parce qu’il faut que l’on puisse débattre de cette pièce, que je puisse donner les explications sur cette pièce et le juge est obligé de s’assurer qu’il y a de la contradiction dans ce qu’on fait pour arriver à rendre sa décision. Le principe du contradictoire doit être obligatoirement respecté. Le juge peut même organiser des confrontations et c’est ce que nous avons demandé, la confrontation de nos procès-verbaux pour qu’on regarde tous ensemble qui dit vrai. Le juge qui instruit une affaire peut également ouvrir des enquêtes pour auditionner des gens qui pourraient éclairer sa religion, ce qui n’a pas été le cas dans cette affaire du recours de M. Jean Ping devant la Cour constitutionnelle. Par exemple nous avons communiqué nos 174 procès-verbaux du Haut-Ogooué alors que les 297 procès verbaux qu’ils prétendaient détenir nous ne les avons jamais vu, ils ne nous les ont jamais communiqué. Et malgré le fait que j’ai saisi le juge rapporteur qui était chargé de suivre l’instruction pour lui dire que nous avons besoin de ces éléments pour qu’on puisse en discuter, il m’a répondu clairement qu’il n’ y aurait rien de tout cela, qu’il refusait de donner une suite favorable à mes demandes. C’est pourquoi je parle d’opacité de la procédure. Tout a été fait de manière cavalière pour que leur objectif soit atteint celui de désigner leur candidat vainqueur et ils l’ont fait sans aucun scrupule. C’est dommage et c’est triste pour notre pays. »

Lauris Pemba
Lauris Pembahttps://www.gabonmediatime.com
Titulaire d'un Master en droit Public, je suis passionnée par le journalisme depuis des années. J'anime l'actualité au quotidien sur GMT depuis son lancement en juillet 2016.

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