C’est à la faveur d’une interview accordée à Gabon Media Time que la responsable du Programme national de sélection et d’amélioration variétale et production de semences (PNSAV-PS) a mis en lumière les actions menées par ce programme de recherche. Occasion pour le Dr. Yonnelle Dea Moukoumbi de faire un focus sur le projet riz organoleptique dont la mise en vente officielle reste conditionnée par l’accompagnement financier de l’État en sus de l’effort consenti par les organismes internationaux.
GMT: Bonjour, Dr. Yonnelle Dea Moukoumbi, vous êtes la responsable du Programme National de Sélection et d’Amélioration Variétale et Production de Semences (PNSAV-PS), un programme peu ou pas connu du grand public. Et si vous nous en parliez ?
Dr. Yonnelle Dea Moukoumbi (YDM): Le PNSAV-PS est un nouveau programme de recherche né d’un constat sur l’absence de matériel végétal développé ou introduit par la Recherche Scientifique ainsi que par la volonté du Ministère de la Recherche Scientifique d’accompagner le Ministère en charge de l’Agriculture dans le développement du secteur agricole de notre pays par la production et la mise à disposition de la semence de qualité des cultures céréalières, vivrières et industrielles cultivées localement.
Par conséquent, il devenait nécessaire pour le pays de disposer d’un programme de recherche spécialisée sur la production de semences de qualité à partir du matériel végétal issu des plantes annuelles (céréales, légumineuses, plantes à tubercules, banane plantain, etc.) et pérennes (plantes oléagineuses, fruitières, industrielles…) introduit ou développé par le PNSAV-PS.
Ainsi, le PNSAV-PS pourra répondre aux préoccupations des acteurs du développement agricole notamment les producteurs, les transformateurs, les multiplicateurs semenciers, … à travers la création variétale (ou sélection et amélioration variétale) et la production de semence de qualité sur l’ensemble du territoire national.
GMT: À l’heure actuelle, le PNSAV- PS travaille sur des projets. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Dr. YDM: Le projet riz conduit par le PNSAV-PS constitue l’une de ses principales activités en ce moment. Cependant, depuis trois mois, des recherches portant sur l’amélioration variétale de la tomate et sur la protection des cultures (cas du maïs) ont débuté et sont conduites par des chercheurs du PNSAV-PS.
Les trois années écoulées ont permis au PNSAV-PS à travers le projet riz d’effectuer des tests d’adaptabilité sur plus de 5000 lignées (futures variétés de riz) reçues du programme KAFACI afin d’identifier et de sélectionner celles qui s’adaptent aux conditions de culture de l’Estuaire.
Par ailleurs, des variétés homologuées par les Systèmes Nationaux de Recherches Agronomiques (SNRA) partenaires et largement cultivées en Afrique sub saharienne ont été introduites et testées sur le site expérimental de Kougouleu en vue de sélectionner celles qui s’adaptent également à nos conditions de cultures.
Les lignées et les variétés ainsi sélectionnées vont être testées dans les principales localités du pays en collaboration avec le Ministère en charge de l’Agriculture afin de sélectionner uniquement celles qui vont avoir un bon rendement et qui par ailleurs seront tolérantes à certains stress biotiques rencontrés. Puis, suivront les tests de dégustation avant leur homologation et leur inscription au catalogue des variétés de riz du Gabon à l’horizon 2022. Mais ce chronogramme ne peut être mené à terme que si l’appui financier du gouvernement est effectif.
GMT: Au nombre des besoins criants du secteur agricole, pourquoi avoir ciblé le riz?
Dr. YDM: Le riz comme vous avez pu le noter est devenu l’une des principales céréales les plus consommées au Gabon. Sa consommation par habitant est évaluée à plus de 54 kg/an pour la grande partie des ménages indépendamment de la classe sociale considérée. D’ailleurs, dans le cadre de l’aide alimentaire apportée par le gouvernement aux populations durant la crise de la covid-19, le riz a constitué l’aliment de base de choix des kits alimentaires distribués.
GMT: quelles sont les caractéristiques des variétés de riz sur lesquelles vous travaillez ?
Dr. YDM: Pour tenir compte des habitudes alimentaires de la population gabonaise, nous travaillons sur les qualités organoleptiques préférées par nos compatriotes. Il s’agit du riz long grain, translucide et parfumé ; le riz long grain non parfumé, le riz grain moyen et non parfumé auxquels nous avons ajouté le riz noir et le riz de la bière.
GMT: Vous disiez que le respect du chronogramme établi sur 2022 est conditionné par l’appui financier du gouvernement. Est-ce à dire que vous ne bénéficiez pas de l’appui des partenaires internationaux ?
Dr. YDM: Non. Tout au contraire, nous avons eu le financement reçu de l’Organisme intergouvernemental sud-coréen, KAFACI (Korea-Africa Food and Agriculture Cooperation Initiative) au projet de recherche sur « le développement des variétés de riz à haut rendement dans les conditions de cultures du Gabon » a permis de débuter les activités du programme. Outre KAFACI, nous avons reçu un appui en don de matériel agricole et technique de l’Agence Internationale de Coopération Japonaise, JICA (Japan International Cooperation Agency). Nous avons entamé une coopération avec la Coalition pour le développement de la riziculture en Afrique), CARD (Coalition for African Rice Development) dont nous espérons un engagement fort dans l’avenir pour booster le secteur rizicole.