C’est un nouveau rebondissement dans l’affaire Ismaël Nzeh, décédé le mercredi 2 décembre au Centre Hospitalier Régional de Makokou après avoir été aux mains des gendarmes dans le cadre d’une garde à vue qui a duré plus de 6 jours. Près de 2 semaines après, ses codétenus affirment que le jeune homme aurait été copieusement torturé par les gendarmes, notamment le maréchal des logis Onis Ngongnet Mabika qui aurait déclaré «Tu vas me sentir ». Une version qui vient rebattre les cartes dans cette affaire que la justice ogivine semble avoir précipitamment classée.
C’est la plateforme ogivine Métandou Mia Mékambo qui a livré les résultats de ses premières investigations au sujet du décès présumé par maladie du jeune Ismaël Nzeh. Et le moins que l’on puisse dire c’est que la version des témoins de la scène est aux antipodes de celle donnée le lendemain du décès de l’adolescent de 17 ans. En effet, si les gendarmes affirmaient que le regretté traînait des problèmes de santé qui l’auront finalement emporté, sa mère révèle qu’il n’en est rien. « Mon fils était en bonne santé, nous ne lui connaissions pas une maladie particulière », a-t-il indiqué.
La version des faits répandue serait totalement infondée
Par ailleurs, des témoignages poignants de ses codétenus soutiennent clairement la thèse d’une bavure policière camouflée par les autorités judiciaires de la province en tête desquelles le procureur de la République près le tribunal de première instance de Makokou. Cette dernière avait tenté de clore les débats en affirmant, sans éléments probants, qu’Ismaël Nzeh est mort des suites d’une maladie. « Ils étaient nombreux et celui qui est décédé était malade depuis Mekambo. Il présentait des signes de fatigue, d’hémiplégie et a rendu l’âme à l’hôpital », avait déclaré Euphrasie Ayemingui à l’Agence gabonaise de presse (AGP).
Les langues se délient enfin
Gardé à vue à la brigade de Mekambo dans le cadre de la même affaire puis remis en liberté pour insuffisances de preuve du plaignant, Georges Mboumet a décidé de sortir de sa réserve. Il révèle dans un entretien accordé à la plateforme Ogivine Métandou Mia Mékambo que dès « son arrivée Ismaël Nzeh a aussitôt été déshabillé », a-t-il déclaré. Il aurait par la suite été battu par des gendarmes lui réclamant des aveux. Se refusant à ces injonctions, l’adolescent sera torturé après avoir été arrosé à l’eau salée durant les 6 jours passés en garde à vue. Des sévices corporels à l’initiative du maréchal des logis Onis Ngongnet Mabika.
C’est ce dernier qui aurait nourri une haine envers l’adolescent. « Onis Ngongnet Mabika nous a dit qu’il a envie de taper sur quelqu’un », rapporte l’ancien codétenu. L’agent n’aurait pas tardé à mettre à exécution ses velléités de violence. « Il a appelé le défunt Ismaël et a commencé à le tabasser sérieusement en lui disant de répéter cette phrase après lui: «Je serai policier », a-t-il poursuivi au bord des larmes. Onis Ngongnet Mabika finira par crier «Tu vas me sentir, ton vampire ce n’est pas avec moi, tu verras ».
En route vers une mort certaine entretenue par l’indifférence des gendarmes
Dans la nuit du dimanche 29 au lundi 30 novembre 2020 apprend-t-on, la santé d’Ismaël Nzeh se dégradera à tel point que Georges Mboumet sera paniqué. Il serait allé alerter les gendarmes sur la nécessité de transférer son ami vers le centre de santé non loin de la Brigade. En réaction, ces derniers ignorent royalement le jeune homme sous prétexte qu’il s’agirait d’une mise en scène. Le lendemain, « Après 6 jours de garde à vue, au moment de notre transfert sur Makokou où devait avoir lieu notre jugement, Ismaël ne pouvait plus tenir debout , son épaule semblait être brisée, son corps était recouvert d’excréments », nous a confié Georges Mboumet, codétenu dans la cellule.
En dépit de toutes les alertes lancées par les autres détenus, Ismaël Nzeh ne sera pas secouru. En route vers le tribunal, l’adolescent aura perdu connaissance au niveau de Bonamaza, un village sis à 54 km. Pour le ramener à lui, le Commandant de Brigade décide d’acheter un morceau de sucre et tente de l’introduire dans la bouche du jeune mal en point. Le calvaire se poursuit jusqu’à l’arrivée de Zita, une de ses tantes. C’est elle qui va le conduire au Centre Hospitalier Régional de Makokou. Une tentative vaine puisqu’Ismaël Nzeh rendra l’âme excédé par la douleur de ses blessures le mercredi 02 décembre 2020. Depuis, sa famille crie Justice pour son vaillant enfant. Nous y reviendrons !